ANALYSE

Les ingérences étrangères en Libye

« La Libye est devenue un lieu où d’autres puissances se livrent une guerre par forces interposées, et nous ne voulons plus l’accepter ». Heiko Mass, Bruxelles le mardi 7 janvier 2020. La Libye, en guerre depuis 2011, est un pays très convoité par ses voisins et l’Occident pour ses nombreux avantages géostratégiques et ses ressources naturelles.

« La Libye est avant tout un espace stratégique pour l’Europe. D’une part, elle détient de riches champs de pétrole et de gaz. Et, d’autre part, elle porte une importance cruciale dans le contrôle de la pression migratoire ».

Au ministère des affaires étrangères français, on estime qu’environ 500’000 à 750’000 migrants subsahariens attendent sur les côtes libyennes afin de rejoindre l’Europe. En intervenant en Libye, l’Europe espère réduire voire arrêter ces flux migratoires en provenance du Maghreb. 

Environ treize acteurs sont directement ou indirectement impliqués en Libye. C’est la première fois depuis un siècle, qu’un conflit au Maghreb concerne et implique l’Europe de manière directe. Les conflits importés en Libye, déstabilisent l’ensemble du Maghreb, et c’est cette instabilité qui inquiète les acteurs occidentaux, par peur qu’elle se transfère sur l’entièreté du bassin méditerranéen. Une grande partie des acteurs étrangers est intéressée par le commerce de ressources naturelles et d’armes avec la Libye. Au sein de ces treize pays présents en Libye, il y a notamment l’Égypte, l’Algérie, les Émirats Arabes Unis, le Soudan, l’Arabie Saoudite, le Tchad, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, les États-Unis, la Russie, la Turquie et le Qatar. Ces acteurs n’ont pas changé depuis 2011, cependant ce qui a changé c’est leur agressivité militaire, qui est le résultat d’une impunité internationale. Aucun mécanisme international n’intervient contre les ingérences et les violations internationales. 

Le Soudan est un acteur concerné du fait qu’il partage des frontières communes avec la Libye, et qu’il y a un grand nombre de mercenaires soudanais sur le territoire libyen. Le Tchad, lui, partage d’anciennes animosité avec la Libye pour des raisons d’ethnies ainsi qu’une frontière commune au Nord du pays. La frontière tchado-libyenne a déjà été fermée deux fois au courant de l’année 2019, par peur du gouvernement tchadien que les groupes armés rebels libyens y répandent le chaos. L’Algérie est elle aussi directement concernée par l’éventuelle dégradation de la situation libyenne, avec qui elle partage plus de 1’200 kilomètres de frontières communes. 

Dès le mois d’avril 2011, des livraisons d’armes illégales ont été effectué part des ÉtatsUnis, de la France et les monarchies du Golfe, sur le territoire libyen et ce malgré la mise en place de l’embargo par les Nations Unies, de livrer illégalement des armes au maréchal Haftar. Pour certains Les Émirats sont l’interférant le plus substantiel parmi tous ces autres acteurs étrangers entre 2013 et 2019. Au cours de ces onze derniers mois, l’avancement géographique sur Tripoli des Émirats Arabes Unis n’avance guère. La Turquie a saisi ce manque d’efficacité pour d’avantage renforcer sa présence plus marquée qu’en 2019. 

La Turquie a depuis toujours soutenue le gouvernement d’el-Sarraj, seul gouvernement officiellement reconnu par l’ONU. Le président turc, Erdogan, a signé un accord avec el-Sarraj concernant les eaux territoriales en Méditerranée. Il souhaite avoir une position dominante aussi bien économiquement, que géographiquement parlant. Cependant cet accord implique bien d’autres acteurs, tels que la Grèce et Chypre. Et ceci fait rapidement réagir la communauté internationale, qui dénonce, à plusieurs reprises, l’ingérence turque en Libye. 

Le Qatar, quant à lui, a distribué en moins de huit mois, 20’000 tonnes d’armes de manière illégale en Libye. En comparaison, les qataris ont dépensé 1,2 milliards de dollars, alors que la France a dépensé 750’000 Euros. De plus, ils ont installé de nombreux responsables ayant une proximité avec eux dans des postes de haute importance en Libye. 

D’un point de vue général, le territoire libyen a peu d’importance dans l’histoire occidentale. En revanche, ce territoire porte un immense intérêt. La Libye est un pays extrêmement riche en termes de ressources naturelles avec une petite population et aucune division confessionnelle importante. C’est pour ces raisons hypothétiques, que la Libye pourrait tomber aux mains des frères musulmans et ainsi avoir un effet de contagion sur la péninsule arabique. Et cela est totalement inacceptable pour des pays comme les Émirats Arabes Unis ou l’Arabie Saoudite.

« Les Émirats ont une tolérance, dites zéro, face à une telle éventualité et c’est pour cela qu’ils interviennent, afin d’écarter tout mouvement islamiste en Libye ». 

Mais la France est également concernée par ce non-respect de l’embargo prononcé. Elle est même régulièrement accusée de jouer un double jeu. D’une part elle reconnaît le gouvernement d’el-Sarraj à Tripoli, et d’autre part des conseillers militaires français sont présents dans le camp de Haftar à Benghazi. 

L’Italie est l’un des pays les plus touché par la migration provenant des côtes libyennes. Elle porte donc un grand intérêt face au contrôle de la crise migratoire. Mais elle garde également un grand intérêt face aux ressources précieuses libyennes de haute qualité. Puis, il ne faut pas oublier de mentionne un acteur plus ou moins absent, qui sont les États-Unis. Ils auraient des intérêts à intervenir, mais ils ne peuvent être présents sur tous les fronts et c’est ce qui explique leur absence quasi-totale en Libye, hormis dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. 

On constate le nombre important d’acteurs internationaux présents en Libye. Les raisons sont nombreuses, que ce soit par intérêt pétrolier, géostratégique, religieux, sécuritaire ou migratoire. Chacun de ces gouvernements choisit d’intervenir à l’extérieur de leur territoire ainsi que d’enfreindre les lois internationales. Ces actes restent pourtant sans conséquences internationales et sont souvent même mis à l’écart des médias. La grande question est alors ces ingérences étrangères font-elles uniquement prolonger les conflits internes libyen ?  Ou alors apportent-elles aussi des solutions à certains problèmes ?

Fleur Mast 

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